• Abrogation de la réforme territoriale

    Dominique Adenot, Président de l’Association Nationale des Elus Communistes et Républicains s’est adressé au Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, notamment sur l’abrogation de la réforme territoriale.


     

     
     

     

    LA LETTRE : 

     

    Monsieur le Premier Ministre, 

     

    Notre association a pris connaissance avec attention de votre déclaration de politique générale prononcée le 3 juillet devant les députés.

     

    Elle a bien noté et apprécié positivement votre décision de mettre en application dans la législature le droit de vote des résidents étrangers aux élections municipales, ainsi que le non cumul d’un mandat parlementaire et l’exercice de fonctions électives locales.

     

    Pour ces deux mesures, qui concourent à combattre la crise démocratique que connaît notre pays, vous pouvez compter sur tout notre soutien. Il en est de même pour l’abrogation du conseiller territorial.

     

    Mais nous avons relevé l’absence dans votre propos de toute référence à l’abrogation de la réforme territoriale du 16 décembre 2010, dite réforme Sarkozy. Celle-ci a été critiquée avec force et rejetée dès le départ par une majorité d’élus. Les fédérations nationales d’élus de gauche, FNESR, FEVE et ANECR ont lutté et manifesté ensemble contre l’adoption de cette loi.

     

    Elle introduit en effet au sein de nos institutions une logique libérale dénaturant des principes fondamentaux de notre République, comme celui de la garantie d’égalité des citoyens sur tout le territoire. Elle met à mal la décentralisation. Il s’agit en particulier de la dévalorisation du rôle des départements et des communes, la remise en cause de la libre administration des collectivités et de leur compétence générale, le regroupement forcé de communes et de groupes de communes.

     

    Conjuguée avec l’austérité imposée aux collectivités, elle porte gravement atteinte aux capacités de service public dans les territoires et aux intercommunalités de projet. C’est pourquoi, si l’abrogation annoncée du conseiller territorial, déjà actée par un vote majoritaire au Sénat, constitue une avancée, cela ne peut suffire à effacer toutes les conséquences structurelles de cette loi de 2010.

     

    Selon nous, avec l’acte III de la décentralisation, il faut à l’automne repartir en procédant à une remise à plat beaucoup plus complète des enjeux et des défis à relever, rompant avec les visées réductrices de la commission Balladur/Mauroy, à l’origine de la réforme. C’est ainsi que nous pourrons construire une réforme territoriale ambitieuse, répondant aux défis humains et démocratiques d’aujourd’hui, avec des services publics et des champs d’intervention publique locale élargis, véritables boucliers anticrise et vecteurs de solidarité.

     

    De même, il est très important de rompre avec l’asphyxie financière des collectivités territoriales, mise en œuvre avec zèle par le gouvernement précédent, avec notamment la suppression de la taxe professionnelle, le gel des dotations, le transfert de charges non compensé.

     

    Une réforme de la fiscalité locale s’impose pour redonner des moyens d’action aux communes, départements et régions. Ceux-ci sont vous le savez à l’origine de plus de 70% des investissements publics du pays et de multiples politiques solidaires et sociales. Ils sont bien gérés, vecteurs d’innovation, de développement économique, social et environnemental, ils sont parmi les premiers défenseurs de l’emploi. Leur meilleure santé est un facteur déterminant pour une croissance retrouvée. C’est aussi, en garantissant leur libre administration, un élément essentiel d’une vraie décentralisation.

     

    C’est pourquoi, nous marquons notre réprobation sur la teneur des différentes informations qui parviennent, lettres de cadrage du Projet de Loi de Finances, cour des comptes, déclaration de Madame la Ministre de la réforme de l’Etat, de la Décentralisation et de la Fonction Publique… Celles-ci font état du maintien du gel des dépenses de l’Etat, d’une réduction supplémentaire des dépenses publiques. Vous-même, Monsieur le Premier Ministre, dans votre discours devant les députés, en appelez à ce que « l’Etat et les collectivités locales mènent une action plus lisible, plus efficace et moins coûteuse, en finissant avec les doublons administratifs. ». Monsieur Cahuzac, Ministre délégué au budget n’a pas démenti l’effort qui sera encore demandé aux collectivités en laissant entendre un nouveau gel de leurs dotations.

     

    Nous ne pouvons également accepter les annonces de votre gouvernement portant sur le non remplacement d’agents partant à la retraite dans la Fonction publique hors ministère de l’Education, de la Justice et de l’Intérieur, décisions qui frapperaient encore les collectivités et la qualité du service public rendu aux populations. Dans votre discours du 3 juillet, vous avez dit vouloir refuser l’austérité et vouloir le retour de la croissance. Nous partageons ce point de vue. Mais est-il possible de concilier efficacement une politique qui poursuivrait cette réduction des dépenses publiques mettant à mal les collectivités territoriales et les services publics, avec une politique de croissance utile ? Nous ne le pensons pas.

     

    Le pacte de croissance arraché à Madame la Chancelière Angela Merkel, est certes un pas en avant. Mais il est loin en l’état de prendre le dessus sur le TSCG c’est-à-dire le pacte budgétaire contenant la « règle d’or » imposant une austérité renforcée aux Etats au mépris de leur souveraineté. L’ANECR demande avec force et solennité que le TSCG fasse l’objet d’une consultation du peuple par référendum.

     

    Il est très important de prendre appui sur les collectivités pour sortir de la crise, ce qui suppose de les sortir des difficultés financières qui les frappent et qui touchent durement les populations. Il est efficace dans ce sens de rétablir un impôt économique lié au territoire et à l’emploi, d’en élargir l’assiette. Une taxation des actifs financiers des entreprises rapporterait également plusieurs dizaines de milliards tout en décourageant la spéculation.

     

    Ces mesures, et d’autres, sont de nature encore une fois à garantir le principe de libre administration des collectivités, qui, avec la préservation de la compétence générale pour tous les niveaux institutionnels, est la condition de tout approfondissement de la décentralisation. Dans les territoires, aux cotés de leurs concitoyens et dans les lieux de concertation comme les Etats-généraux du Sénat au mois d’octobre, les élus communistes et républicains agiront dans ce sens, avec la volonté que le changement tant attendu par les populations voie le jour. Nous vous prions, Monsieur le Premier Ministre, de recevoir l’assurance de notre très haute considération. 

     

    Dominique Adenot, Président de l’Association Nationale des Elus Communistes et Républicains 

     

     

     

     


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